Le féminin divin: Les déesses-mères - "Isis" - La femme complète
- Par kleiberpat
- Le 08/06/2020
- Dans Que nous révèlent les contes et mythes?
ÉLÉMENTS D’ANALYSE DU "MYTHE D’ISIS" (mythologie égyptienne)
Ce mythe illustre une lutte interminable entre des forces opposées: bien et mal, lumière et ombre, masculin et féminin… Jusqu’à la résolution de ce tragique conflit qui passe par un conflit familial.
Il remplit parfaitement sa fonction de mythe: à savoir, transmettre aux humains la manière dont les forces ou énergies opposées se combattent et celle de les unifier et les intégrer.
Les Égyptiens avaient compris cette chose essentielle qui a été refoulée collectivement dans la civilisation occidentale: le négatif et le positif, le bien et le mal sont complémentaires et nécessaires à l’équilibre des forces, à la stabilité de la vie. Le mal a donc une fonction dans le monde.
Les mythes ou religions antiques étaient à la fois plus primaires, frustes, archaïques, instinctifs et violents que les traditions spirituelles actuelles.
Mais, en raison de leur proximité avec l’inconscient, ils connaissaient mieux la nature humaine, et en comprenaient mieux les conflits et les aspects instinctifs.
Isis s’appelait en Égypte Asèt, "Le trône": les Grecs l’ont traduit pas "Isis".
Asèt apparaît deux millénaires avant J.C.: une inscription sur son temple à Dendara la décrit comme "noire" - comme de nombreuses autres déesses, jusqu’aux "vierges noires" du christianisme.
Au début, elle s’approprie avec ruse le pouvoir du dieu soleil Râ. Elle détient donc dès le départ un grand secret: le nom de dieu. Cela lui confère une immense puissance spirituelle et divine et lui permet de surmonter ses épreuves, de sauver, de guérir, de vaincre les forces opposées.
Elle devient universelle. Son culte s’étend au Moyen Orient, en Grèce, à Rome, dans tout le bassin méditerranéen. De surcroît, elle est l’initiatrice de toutes les traditions ésotériques et gnostiques ultérieures.
C’est ainsi qu’Asèt/Isis a commencé son incomparable "carrière" de déesse-mère.
Elle est la déesse la plus importante du panthéon égyptien, pour une durée de 3000 ans environ. Elle a absorbé de nombreuses autres déesses.
Elle est exceptionnellement complète, à la fois solaire et lunaire, femme, fille, sœur, épouse et mère.
Naissance des dieux égyptiens
Au début, il y avait Râ, le dieu soleil suprême, qui s’est engendré lui-même.
Il a donné naissance à un premier couple, Hou et Tefnout, puis à un second couple, Geb (le dieu terre) et Nout (la déesse du ciel) étendue sur son époux. Puis Râ a séparé Geb et Nout unis dans un mariage sacré, ce qui a permis à Nout d’enfanter 5 enfants en 5 jours.
Le premier jour, naquit l’aîné, Osiris et l’héritier légitime de son père. Le second jour, Horus dit l’Ancien. Le troisième jour, Seth, pâle et roux, semblable à un animal sauvage, qui déchira les flancs de sa mère. Le quatrième jour vint Isis la divine. Et le cinquième jour, Nephtys, la plus belle.
Naissance des 5 enfants de Geb et Nout
Les 5 enfants de Geb et de Nout naissent en cinq jours.
Le premier jour, naît Osiris.
Osiris veut dire "épi de blé gorgé de soleil". Il signifie aussi "le Noir". Il représente le charme et la séduction, l’intelligence, la non-violence, la capacité civilisatrice et culturelle.
Osiris est fils de la lumière et esprit de la nature.
Le deuxième jour naît Horus dit l’Ancien ou l’Aîné, en opposition au fils d’Isis et d’Osiris, Horus le Jeune. Il est conçu par Isis dans le ventre de leur mère et est une force positive.
Isis n’enfante ses deux fils que spirituellement: le premier Horus est enfanté dans le ventre de sa mère, le second grâce au Phallus de terre qu’elle crée pour Osiris.
Isis est donc vierge, bien qu’épouse et mère.
Philon d’Alexandrie permet de comprendre ce que signifie cette "virginité" dans l’antiquité et son rapport avec le divin en écrivant: "Il convient, en effet, que Dieu s’allie avec une nature pure et sans tache, avec celle qui est en vérité la vierge, très différente des autres. Car les relations avec des hommes en vue de la procréation rendent les vierges femmes. Mais si Dieu vient à s’unir à l’âme, il rend celle qui était déjà femme vierge à nouveau."
Le troisième jour naît Seth. Il a l’aspect d’un animal composite, avec un museau, une queue. Il est roux ou rouge, et responsable des brouillards, des tempêtes de sable, des ouragans et orages, du désordre et du chaos de la nature, de la confusion, de l’aridité et la sécheresse, du blé coupé. Il est violent, excessif, cruel, destructeur, cupide, concupiscent. Il désire sans aimer, est dévoré de jalousie, ce qui ne peut que générer des désillusions, des colères, des vengeances.
Il est le principe même du mal.
L'âme d'Isis
Le quatrième jour, naît Isis. Son nom signifie "Ancien". On l’appelle aussi Maat, c’est-à-dire le "savoir" ou la "sagesse". Elle représente une sagesse ancienne qui voit les choses telles qu’elles sont, qui se soumet à la nature des choses. La sagesse de l’instinct.
Pour les Grecs, elle est également la sagesse, la "Sophia". Son nom est proche d’"Isia" qui veut dire "connaissance". Elle représente la nature verte et féconde, la femme dévouée, fidèle, rédemptrice, compatissante, créatrice, guérisseuse, inspiratrice, initiatrice, magicienne.
Elle est une figure féminine supérieure, le principe féminin positif qui a intégré son masculin et peut apporter une aide précieuse aux hommes. Par le pouvoir et l’amour d’Isis, l’homme s’élève vers la vie spirituelle.
En Égypte, les relations conjugales, comme la relation entre Isis et Osiris, sont plus importantes qu’ailleurs, où la déesse-mère supplante le dieu ou son fils-amant.
Cela fait d’Isis une déesse-mère unique. Osiris devient immortel tout en demeurant son époux lunaire, après être assimilé au dieu soleil Râ.
Seth et Osiris sont des frères ennemis éternels, semblables à Abel et Caïn. L’un des deux doit être vaincu et tué par l’autre.
Enfin, le cinquième jour naît la plus belle, Nephtys: celle par qui le malheur arrive, mais qui a une fonction fondamentale dans ce conflit.
Les attributs d'Isis: le noeud magique et le voile
Isis a des attributs importants: la croix ansée, l’Ankh ou nœud magique, et le voile d’Isis.
La croix ansée est une figure ovale qui domine une croix: c’est le hiéroglyphe égyptien qui signifie "vie". Cette croix représente le soleil, le ciel et la terre, ainsi que l’homme.
Elle est un symbole d’union des contraires et représente le centre. Isis la porte dans sa main pour montrer qu’elle détient le secret de la vie, l’immortalité.
La croix ansée est liée au nœud d’Isis, qui est aussi un symbole d’immortalité. Celui-ci se trouve sur la tête, dans la main ou à la ceinture des personnages. Ce nœud ou cette boucle représente l’énergie vitale d’Isis, d’où découle toute manifestation de vie. Il évoque les liens qui attachent à la vie terrestre, qu’il faut dénouer pour accéder à l’immortalité et à la spiritualité.
Sur le plan psychologique, le dénouement des nœuds est fondamental pour accéder à sa nature spirituelle et complète. Il faut défaire les noeuds et réaliser le dénouement pour se libérer des attachements et devenir vivant, pour atteindre un niveau de conscience supérieur. Dénouer un complexe qui nous bloque nécessite une immense patience.
Il faut éviter de trancher le nœud avec violence et le dénouer progressivement, sinon on ne parvient pas à dénouer le problème.
Cela équivaut à refouler violemment quelque chose ou à "trancher" une fois pour toutes. Une telle attitude ne peut mener qu’à un déblocage artificiel d’un complexe ou d’un problème qui va se répéter jusqu’à ce qu’on l’ait traité avec justesse.
L’autre attribut important d’Isis est son voile. À Saïs en Égypte, sur une statue d’Athéna identifiée à Isis, on peut lire cette inscription: "Je suis tout ce qui fut, qui est et qui sera et nul mortel n’a jamais soulevé mon voile."
Le voile d’Isis est semblable au voile de Maya. Il représente le monde des apparences qui empêche de voir la réalité. Le voile est aussi le filet de la nature qui nous emprisonne dans notre destin. Et pourtant, l’esprit divin doit être pris dans ce filet, sinon il ne pourrait pas se manifester.
L’esprit de l’homme doit être pris dans le filet d’Isis pour être transporté dans sa barque et poursuivre sa route, progresser.
Psychologiquement, il y a des moments où notre conscience s’éveille à une autre réalité, s’élargit: elle comprend que le monde des apparences n’est pas le monde réel.
La naissance d'Anubis
On dit qu’Isis et Osiris étaient déjà éperdument amoureux dans le ventre de leur mère et y conçurent Horus l’Ancien. Ils étaient destinés l’un à l’autre, et devenus adultes, se marièrent. Osiris devint le premier roi d’Égypte et Isis sa reine.
De leur côté, Seth et Nephtys se marièrent, mais sans la moindre passion ni joie. Seth était froid et dur, sec et violent, sans charme ni séduction. Tout le contraire d’Osiris, à la beauté fascinante, si tendre et doux. Et Nephtys souffrait de plus en plus des assauts de Seth et les subissait dans la douleur.
Il arriva donc l’irréparable: un soir, Nephtys trompa Seth avec Osiris. Bientôt, elle sut qu’elle portait un enfant de lui. L’apprenant, Seth fut envahi par une haine sauvage et implacable. Il s’acharna à détruire en Nephtys toute joie d’enfanter.
À sa naissance, l’enfant avait un visage de chacal et une odeur animale. Il fut appelé Anubis. Sous les injonctions de Seth, Nephtys l’emmena dans le désert pour l’y abandonner.
Malgré la trahison d’Osiris, Isis était décidée à sauver Anubis. Elle eut l’intuition que cet enfant ne devait pas être perdu et qu’il avait sa place dans le monde. Anubis et il devint son garde du corps fidèle et dévoué.
Lorsqu’Isis épouse Osiris, elle est une déesse du foyer, une épouse dévouée et puissante. Et ce, jusqu’au jour où la belle Nephtys, insatisfaite et frustrée par Seth, le trompe avec Osiris et attend un enfant de lui.
Anubis est mi-animal, mi-humain, avec une tête de chacal.
Nephtys veut l’abandonner mais Isis le sauve.
Pour la première fois, Isis manifeste sa faculté de sauver et son infinie compassion. Elle est assez forte et bienveillante pour dépasser la jalousie, la haine, la revanche, et elle pardonne à Osiris de l’avoir trompée.
Elle fait preuve de compréhension, d’intelligence et de clairvoyance. Et elle comprend avec lucidité que cet enfant, comme toute créature, a une fonction dans le monde.
Anubis va l’aider et devenir son garde du corps. Il devient l’enfant protecteur pour elle, peut-être son "enfant intérieur".
Cela signifie que les choses vulnérables et vouées à la mort peuvent nous aider et nous donner de la force.
Anubis a une tête de chacal: le chacal se nourrit des cadavres. Mais le vrai chacal n’existe pas en Égypte. Il s’agit d’un chien errant ou d’un loup.
La vengeance de Seth
La haine meurtrière de Seth fut exacerbée lorsqu’il vit que l’enfant de l’adultère était toujours vivant. Il jura de se venger.
Il attendit longtemps, car Osiris était un grand roi, aimé de tous. Civilisateur intelligent, profondément humain, il enseignait à son peuple sauvage et misérable, l’agriculture, le droit et les lois, la religion et les rites dus aux dieux. Il voyagea longuement dans des contrées lointaines, et tentait partout d’adoucir les mœurs des humains et de leur inculquer une force non fondée sur les armes. Lui-même jamais n’en usa. C’est ainsi qu’il séduit tous les êtres par la persuasion, la parole et le charme. Il fut plus qu’aimé: partout où il passait, on l’adorait.
Dès son retour, Seth le convia à un grand festin en l’honneur des dieux. L’odieux frère avait fomenté un monstrueux complot. Il avait fait fabriquer un coffre de la taille exacte d’Osiris. Lors du banquet, il dissimula 72 gardes de sa suite aux alentours et montra le beau coffre aux convives, promettant de l’offrir à celui qui y tiendrait tout juste. Et tous de s’y coucher, pour voir lequel était le plus parfait. Mais aucun n’y fut à l’aise.
Lorsque vint le tour d’Osiris, le coffre lui allait parfaitement. "Tu es si beau!", le flatta Seth alors qu’il s’étendait dans le coffre. Puis ses gardes arrivèrent et refermèrent brusquement le couvercle en le scellant avec du métal fondu. Ils le portèrent jusqu’au Nil et le jetèrent dans ses eaux. Le coffre partit à la dérive.
Fou de rage, Seth veut se venger d’Osiris et lui tend un horrible piège. Il organise un grand festin pour les dieux où il invite Osiris. Il leur propose d’essayer un coffre, en leur assurant qu’il est destiné au plus courageux d’entre eux. Osiris tombe dans le piège. Il est enfermé dans le coffre et jeté à l’eau.
Se retrouver à l’eau dans un coffre équivaut à une mort, mais une mort initiatique, où l’on est protégé de l’eau et des forces inconscientes dangereuses qu’elle symbolise, où l’on peut sombrer.
Osiris est donc voué à la mort, enfermé dans un cercueil. Mais il est protégé par le coffre, le contenant maternel qui empêche l’eau de le submerger.
Il ne se bat pas car il est non-violent, lunaire, féminin. Il s’abandonne à son destin et c’est cette attitude féminine qui va le sauver.
Première quête d'Isis
Le lendemain, Isis apprit la cruelle nouvelle: aussitôt, elle revêtit des vêtements de deuil, se coupa la moitié de sa belle chevelure et partit à la recherche du coffre perdu. Elle erra longuement à travers le pays. Enfin, elle apprit que l’on avait vu un coffre flotter sur un des bras du Nil, en direction de la mer. Un rêve envoyé par les dieux lui précisa qu’il avait échoué à Byblos, en Phénicie, au pied d’un cèdre.
Depuis que le coffre s’était pris dans les branches de l’arbre, celui-ci n’avait cessé de grandir, au point qu’il finit par envelopper entièrement le coffre. Le roi de Byblos, Malcandre, le fit couper pour en faire la colonne principale de son palais.
Isis part en quête d’Osiris, son masculin disparu et perdu.
La première quête d’Isis consiste à retrouver le coffre d’Osiris. Elle le découvre dans une colonne du palais du roi de Byblos (en Phénicie). Le coffre a échoué dans un cèdre que le roi a coupé pour en faire une colonne.
Le cèdre du Liban symbolise la grandeur, la force, l’immortalité, comme tous les conifères. Les Égyptiens l’utilisaient pour fabriquer des bateaux, des statues, des cercueils.
Osiris bénéficie donc d’une triple protection maternelle: le coffre, le cèdre et la colonne. La colonne est un soutien et symbolise l’arbre de vie, la base de l’enracinement. Dans la bible, les colonnes du temple de Salomon sont en cèdre, comme la colonne d’Osiris. Elles sont immortelles et incorruptibles.
Isis à Byblos
Isis se rendit à Byblos. Aux environs de la ville, elle s’assit près d’une fontaine, versant des larmes, ne parlant à quiconque.
Elle ne salua que les esclaves de la reine de Byblos, leur parlant avec bienveillance, arrangeant leurs cheveux avec art et leur révélant le parfum qui émanait de son corps. La reine fut frappée par la beauté des coiffures de ses esclaves et par le parfum divin qu’elles exhalaient. Elle demanda à voir l’étrangère.
On fit venir Isis. La reine l’adopta, en fit son amie et lui confia l’un de ses fils pour qu’elle le nourrisse. Pour allaiter l’enfant, Isis lui mettait un doigt dans la bouche au lieu des seins.
Chaque nuit, elle passait l’enfant dans le feu pour que ses parties mortelles se consument et qu’il devienne immortel. Puis, elle se transformait en hirondelle et volait autour de la colonne, pleurant la perte d’Osiris. Une nuit, la reine s’éveilla et vit son fils au milieu des flammes. Croyant qu’Isis le brûlait, elle l’éloigna du feu.
Isis devient la nourrice du fils du roi de Byblos. Chaque nuit, elle se transforme en hirondelle et vole en pleurant autour du cercueil d’Osiris dans la colonne. Elle fait aussi passer l’enfant par le feu pour le rendre immortel.
L’hirondelle est un oiseau migrateur: elle est la messagère du printemps et le symbole de l’éternel retour et de la résurrection. Elle ne se pose jamais à terre et n’est donc jamais souillée par le contact avec la terre.
Dans le rituel qu’Isis pratique avec l’enfant du roi, on trouve un thème universel qui est le feu purificateur et régénérateur. La destruction des éléments mortels par le feu représente la destruction de la matière, de l’instinct, la luxure, la sexualité pervertie.
Dans les civilisations agraires anciennes, les rites de purification par le feu sont des rites de passage. Ils évoquent les incendies des champs qui se couvrent ensuite d’un manteau vert.
Isis se transforme en oiseau: soit en hirondelle soit en milan. L’oiseau est l’animal spirituel et céleste par excellence, à l’opposé du serpent terrestre et matériel.
Dans ce mythe, il y a plusieurs oiseaux de proie: le vautour, le milan, le faucon.
Le milan est un oiseau de proie, qui vole haut dans le ciel et a une vue perçante.
En Égypte, il représente le clan auquel on appartient: il symbolise la clairvoyance et est reconnu pour ses talents d’acrobate aérien lorsqu’il s’accouple avec sa femelle.
Quant au fils du roi, Isis ne parvient pas à le rendre immortel, car la reine intervient. Ne comprenant pas ce qui se passe, elle renvoie Isis en tant que "nourrice".
Isis retrouve la colonne d'Osiris
Isis alors se fit connaître: elle demanda qu’on lui remette la colonne. C’était une requête importante, mais le roi y consentit d’autant plus volontiers que son palais était devenu étrangement silencieux depuis que la colonne s’y trouvait.
Lorsqu’elle partit, le fils du roi la suivit dans la barque où elle avait mis le coffre d’Osiris. Puis elle ouvrit le coffre et se jeta éperdument sur le corps d’Osiris dans des transports amoureux éperdus. L’enfant du roi fut effrayé de voir la déesse "dans son horreur": il s’évanouit et tomba dans l’eau, où il mourut.
Le roi accepte aisément de donner la colonne à Isis, car celle-ci provoque un étrange silence dans son palais.
C’est le silence de la mort qu’elle contient, la mort d’Osiris. Une mort qui représente un état de dépression, de rigidité, d’immobilisme.
Alors qu’Isis quitte le palais, le fils du roi la suit. Elle l’a sevré de sa mère et il lui est attaché. Néanmoins, en assistant aux transports amoureux d’Isis, il subit le choc de l’amour dans ses excès et sa violence. Il ne peut le supporter et en meurt.
Pour un homme, une telle situation signifie qu’il comprend les émotions féminines dans leur profondeur. Il y participe, y adhère, les accepte. Il éprouve lui-même ces émotions et est capable de les supporter. Cela est difficile pour les hommes qui ont souvent des difficultés avec les manifestations émotionnelles.
La mort du fils du roi signifie aussi qu’une femme liée à un homme doit sacrifier le "fils" ou "fils-amant", c’est-à-dire qu’elle doit sacrifier son aspect maternel vis-à-vis de cet homme. Si elle y parvient, elle peut vivre une vie authentique, sans dépendance vis-à-vis de l’homme.
C’est ainsi que la femme devient la fille de la déesse: en intégrant l’archétype de la déesse, qui est vivante en chaque femme. En tant qu’archétype, la déesse représente une force psychique immortelle.
Laisser se réveiller la déesse en soi, c’est s’abandonner au réveil de l’inconscient et le laisser oeuvrer à travers soi au renouvellement, à la transformation, et à la renaissance de l’humanité.
Osiris démantelé par Seth
De retour en Égypte, Isis dissimula le corps d’Osiris dans le delta du Nil, pour que Seth n’en fût pas informé. Malheureusement, une nuit qu’il chassait au clair de lune, Seth trouva la dépouille de son frère. Rugissant de fureur, il brandit son glaive et dépeça le cadavre d’Osiris: il découpa le cœur, l’épine dorsale, le cou, la tête, les bras et les jambes, l’estomac, les intestins, la poitrine, le foie, la vésicule et le bassin. Voyant qu’il en avait déjà 14 morceaux, c’est-à-dire 2 fois 7 – un chiffre qui représentait la malchance décuplée de ses ennemis -, il ne coupa pas les parties génitales. Puis il remonta le Nil et enterra les morceaux dans divers lieux. Dans sa rage, il se coupa un pouce.
Malgré les précautions d’Isis pour dissimuler Osiris dans l’eau, Seth le retrouve et le met en pièces. Il le découpe en 14 morceaux.
14 est la somme de 2x7, qui représente un redoublement de force destructrice. 14 correspond aussi aux 14 jours de la lune décroissante, Osiris étant le dieu lunaire.
Seth est si destructeur et autodestructeur qu’il se coupe le pouce: le pouce est phallique et symbolise la force créatrice. C’est grâce au pouce que la main peut prendre, le pouce étant le doigt de la préhension. En se coupant le pouce, Seth s’autocastre et se rend impuissant.
Sur le plan psychologique, Osiris est mort, éteint, inconscient. Il ne peut pas lutter pour sa vie car il est trop vulnérable.
Le démembrement représente son état de dissociation, de division psychique, de désintégration. C’est presque un état psychotique. Les parties de son être enterrées sont totalement refoulées et tombent dans l’inconscient.
Seconde quête d'Isis
Isis fut désespérée. Toute vie se retira d’elle, tout désir, toute force, toute magie. Elle sombra et son âme fut touchée au-delà de toute mesure. Au cœur de sa douleur, Isis eut une révélation: elle devait rechercher les parties du corps démembré de son bien-aimé.
Alors elle se métamorphosa en Hirondelle et partit comme une flèche dans le ciel d’Égypte.
Battant des ailes, elle scruta chaque méandre du grand fleuve, chaque buisson, chaque fourré, chaque marais. Elle se laissa porter par les courants, aspirer par les courants d’air, et retrouva chaque partie de son bien-aimé. Elle rapporta les reliques divines en un lieu secret, où veillaient Nephtys et Anubis.
Après avoir retrouvé Osiris mort mais entier dans son coffre, Isis doit aussi retrouver les parties d’Osiris enterrées pour les reconstituer.
Elle doit le rendre entier, le faire renaître une seconde fois.
Réunification d'Osiris par Isis
Là, elle se mit à réunifier et reconstituer le corps d’Osiris: hélas, il manquait le sexe, qu’un poisson avait dévoré. Alors, Isis modela dans le limon un nouveau phallus, tandis que Nephtys créait des baumes et qu’Anubis assemblait les morceaux. Puis, sous la forme d’un milan, elle vola au-dessus de lui en psalmodiant des incantations magiques, pour éveiller le centre des forces vitales d’Osiris.
Il fut enveloppé dans une peau de léopard, qui lui transmit l’énergie d’affronter la nuit, alors que les deux déesses, Isis et Nephtys, battaient l’air de leurs ailes au-dessus de son cadavre embaumé.
Isis retrouve les parties d’Osiris enterrées, sauf le phallus, symbole de la fécondité. Avec Nephtys et Anubis, Isis embaume Osiris, opérant le rituel d’immortalisation chez les Égyptiens. Il s’agit du passage d’un monde à un autre, d’une dimension de l’être à une autre. À présent, Osiris peut s’éveiller à une nouvelle vie, même si elle n’est plus temporelle et incarnée.
Une fois encore, c’est le féminin qui opère la guérison et la renaissance. Isis reconstitue, réunifie. Elle rend Osiris fécond à nouveau, pour lui donner un successeur. Elle désire un enfant d’Osiris qui puisse lui succéder.
Une fois le phallus recréé, Isis se laisse féconder par Osiris, sous la forme de l’hirondelle. L’oiseau divin réinsuffle vie à Osiris.
Le féminin redonne la vie. Isis revirilise Osiris, lui permettant de redevenir un homme, de réintégrer son masculin.
Elle dit à ce sujet: "Je me suis transformée en homme bien que je sois une femme pour que ton nom – Osiris – perdure sur la terre."
Renaissance d'Osiris
Miraculeusement, Osiris rayonnant se redressa et aperçut le visage inondé de bonheur d’Isis, sa bien-aimée. Anubis murmurait: "Que le dormeur s’éveille, que le pilier érige face au ciel sa vigueur, Osiris souverain, ouvre les yeux, tu es intact, tu es parfait."
Son corps était totalement reconstitué et unifié, enveloppé de bandelettes de lin pur, le sexe de terre pointé vers le ciel. Isis agita ses ailes près de ses narines pour lui redonner souffle et esprit. Puis elle se posa doucement sur lui pour que la vie naisse en elle. La semence d’Osiris l’emplit.
C’est ainsi qu’Osiris fut ressuscité, rendu à la vie éternelle, et s’en alla gouverner le monde de l’au-delà. Il devint le dieu des Morts et de la vie éternelle. On lui rendit les honneurs funéraires à la mesure de sa grandeur.
La femme complète qu’est Isis opère un cycle total de vie-mort-renaissance. Elle est rédemptrice de l’homme et l’aide à se trouver, à devenir lui-même, à cesser d’être un enfant.
Après sa momification, Osiris peut renaître à une autre dimension de son être. Il a fécondé Isis et peut disparaître de ce monde en tant qu’époux. Isis porte en elle le fruit d’Osiris, son esprit, le masculin qu’elle a intégré.
Osiris renaît dans l’autre monde et devient le dieu du royaume des ombres, de l’inconscient. Il a intégré le féminin et devient à la fois un dieu lunaire et solaire, un "maître du grand savoir".
C’est ainsi qu’Isis a réalisé le grand-œuvre, en tant que femme initiatrice qui génère la renaissance de l’homme.
Dans le mythe d’Isis et Osiris, la fonction du féminin est essentielle dans la résolution du conflit entre les forces opposées.
Isis a intégré le masculin et devient une figure féminine complète, la plus importante figure féminine de toute l’antiquité. Elle en a tous les aspects: femme-guide, muse, inspiratrice, initiatrice, guérisseuse.
Et particulièrement, elle est celle qui fait renaître l’homme mort, celle qui réunifie l’homme désuni, celle qui sauve le masculin perdu et dissocié.
Naissance de Horus le Jeune
Seth ignorait tout de la renaissance d’Osiris, et il fut vivement irrité par tous ces rituels funéraires. Il ordonna à ses guerriers de s’emparer d’Isis et de la jeter en prison. Mais elle parvint à s’échapper et chercha refuge dans les marais de Bouto où elle donna naissance au fils d’Osiris, Horus le Jeune.
Après le départ d’Osiris, Isis donne naissance à Horus le Jeune: il est boiteux et a une tête de faucon d’or.
Peut-être la boiterie vient-elle de la façon dont il a été conçu, c’est-à-dire avec un phallus de terre? La boiterie est aussi un signe de renaissance spirituelle dans les mythologies et religions.
Horus a une tête de faucon d’or: en Égypte, la tête de faucon est représentée par un œil ou un disque solaire aux ailes d’épervier. Le faucon symbolise l’acuité perçante et impitoyable du regard justicier. Il veille sur l’exécution des lois et des rites.
Osiris disparu, Horus représente le masculin d’Isis qui va devoir se battre. Car, comme son père Osiris, il va être menacé par le mal et l’ombre.
Isis était épouse mais avec Horus, elle va devenir mère, avec ses aspects positifs et négatifs.
Et en tant que mère, elle doit protéger son fils, l’éduquer aux forces obscures, l’initier, le faire reconnaître comme successeur d’Osiris, lui assurer la légitimité, la souveraineté.
Horus poursuit le combat contre Seth
Horus a hérité de l’aspect solaire d’Isis et a donc un destin royal.
Cela réveille les forces du mal représentées par Seth. Pour Seth, Horus doit être éliminé.
Horus prend la relève dans le conflit avec Seth: il poursuit la lutte entre le bien et le mal, la lumière et les ténèbres.
Pour cela, il a besoin de vigilance, d’avoir les yeux ouverts. Il est devenu l’éternel combattant qui a pour mission de préserver l’équilibre entre les forces opposées et de faire triompher la lumière et le bien.
Osiris l’aide et n’est pas un père absent. Il revient souvent des enfers pour lui enseigner comment combattre et vaincre.
Isis également l’aide, car ce conflit va durer jusqu’à sa résolution finale, l’intégration totale du mal.
À la différence des autres déesses-mères qui doivent sacrifier leur fils pour ne pas être fragilisées par lui, le fils ici n’est pas sacrifié, mais reconnu, guéri, aidé par la mère. Et même si Isis commet une erreur, elle la répare.
Le scorpion mortel
Isis l’éleva en grand secret, car le fils d’Osiris était promu à un destin royal. Elle changeait sans cesse de lieu et de forme. Mais un jour, Seth réussit à déjouer sa vigilance et envoya à Horus un scorpion dont la morsure était mortelle.
Dans le conflit entre Seth et Horus, Seth menace Horus avec un scorpion qui pique celui-ci. Mais Isis le guérit.
En Égypte, l’un des plus ancien hiéroglyphes a la forme d’un scorpion.
Un souverain prédynastique était appelé "le roi scorpion".
Le scorpion a été adoré comme un dieu, sous la forme féminine de la déesse Selket, une déesse bienveillante et guérisseuse.
Chez les Grecs, le scorpion venge la déesse Artémis. Orion voulait lui faire violence et Artémis l’a fait piquer au talon par un scorpion. En lui rendant ce service, le scorpion est devenu une constellation, comme Orion.
En astrologie, le scorpion est un signe d’automne, le moment où la nature meurt avant de renaître. Il représente des forces sombres et obscures, souvent tourmentées.
Il symbolise Seth.
Le combat d'hippopotames
Grâce à ses pouvoirs de magicienne, Isis guérit son fils. Horus continua de grandir: il recevait souvent la visite de son père Osiris qui s’absentait du royaume des morts pour instruire son fils et lui apprendre l’art de régner et de combattre.
Lorsqu’il devint adulte, Seth demanda l’arbitrage des dieux pour la succession d’Osiris. Les dieux se prononcèrent en faveur d’Horus.
Furieux, Seth refusa le jugement des dieux: il proposa à Horus une bataille dans l’eau, sous la forme d’hippopotames, qui durerait 3 mois. Celui qui voudrait sortir de l’eau avant le délai imparti serait déclaré perdant. Cette proposition plongea Isis dans le désespoir, car elle savait que l’hippopotame était une forme naturelle de Seth et qu’il en tirerait parti pour tuer Horus.
Elle se rendit donc déguisée au bord de l’eau: là, elle attacha un harpon à une corde et le lança dans l’eau pour atteindre Seth. Mais elle blessa Horus et retira vivement le harpon en entendant ses cris. Sa deuxième tentative fut plus heureuse et le harpon atteignit Seth. Mais Seth supplia Isis, sa sœur, de lui laisser la vie sauve, et elle se laissa attendrir par ses paroles. Elle eut pitié de lui.
Seth lance un autre défi à Horus. Il lui propose de combattre dans l’eau, sous la forme d’hippopotame. Cela inquiète Isis car l’hippopotame est l’attribut souverain de Seth.
Elle décide d’intervenir pour aider Horus en utilisant un harpon pour frapper Seth. Par mégarde, elle touche son fils. Par ailleurs, elle éprouve de la pitié pour son frère Seth et le sauve.
En Égypte, l’hippopotame représentait des forces négatives. Il était l’ennemi de l’homme, voué à Seth, le mal. Les Egyptiens entretenaient des harponneurs sacrés pour le détruire.
Voyant la pitié d’Isis pour Seth, Horus se mit en colère, jaillit de l’eau et lui coupa la tête. Alors le dieu Thot trancha la tête d’une vache et la posa sur le corps d’Isis. À partir de ce jour, Isis devint la déesse à tête de vache, Hathor.
Isis-Hathor à tête de vache
Touché par le harpon d’Isis, Horus se venge de l’attitude de sa mère, de sa pitié pour Seth. Dans sa colère, il lui tranche la tête. Le dieu Thot met à la place une tête de vache. C’est ainsi qu’Isis se substitue à la déesse vache Hathor et en prend les attributs.
Isis exprime ici son ambivalence de mère. Elle devient la mère sur-protectrice et en subit les conséquences.
Elle va "perdre la tête" par manque de discernement et en raison de sa pitié pour son frère. Elle participe au conflit et se laisse abuser par son frère, alors qu’elle devrait laisser Horus mener le combat seul sans intervenir.
En libérant Seth, en ayant ce mouvement de pitié pour lui, elle trahit Horus et l’expose à la mort, au lieu de l’aider.
La mère sur-protectrice n’est pas positive pour le fils qui doit se battre dans la vie, affronter son destin et ses épreuves. D’où la conséquence négative pour Isis. Elle a la tête coupée. Peut-être a-t-elle utilisé sa tête, son masculin, de manière négative, d’où la nécessité de la perdre et de redevenir féminine.
Quoiqu’il en soit, en tant que déesse-mère complète, elle accepte les aspects contradictoires de la vie: le négatif et le positif, le bon et le mauvais, le bien et le mal. Cela explique sa pitié pour Seth. Elle sait que tout ce qui vit doit mourir pour que le monde et la vie se perpétuent. Elle ne veut pas d’une harmonie permanente où le bien triompherait indéfiniment.
Contrairement au christianisme qui n’a voulu que le bien, elle veut le conflit entre les forces opposées, la confrontation entre l’énergie destructrice et l’énergie créatrice. Car elle sait que ce conflit est source de vie, comme le savaient les Égyptiens.
Elle se retrouve donc avec une tête de vache.
La vache est un animal maternel qui produit le lait nourricier. En Égypte, il y a une ancienne déesse-vache appelée Hathor qui symbolise la fécondité, la richesse, le renouveau, le maternel, en tant que mère du veau. Elle a une tête de vache sacrée qui porte un disque solaire entre les cornes. La vache est associée à la lune avec ses cornes à forme lunaire.
Isis s’en approprie tous les attributs.
D’ailleurs, Isis et Osiris ont tous deux un aspect bovin: Osiris devient le bœuf Apis cornu et Isis porte une couronne de cornes de vaches.
Pour Jung, Horus décapitant sa mère symbolise le triomphe du héros sur la mère. Par cette victoire, le héros devient l’égal du soleil. Il peut renaître à lui-même sans avoir besoin de sa mère. Il acquiert la puissance du soleil éternellement jeune.
L'oeil d'Horus
Les dieux décidèrent de punir Horus pour cet acte sauvage, mais ce dernier avait disparu et ils ne purent le retrouver. Seth lui aussi le rechercha et, l’ayant découvert, lui arracha les yeux qu’il enterra dans le sol.
Après cette tragédie, Horus s’enfuit. Seth le retrouve, lui arrache les yeux et les enterre.
Arracher les yeux de quelqu’un, c’est lui ôter la vue. Horus perd donc la vue, le regard. Il est totalement perdu et aveuglé. Il a besoin d’un regard neuf, d’une vision neuve pour revivre. Il a besoin d’y voir clair à nouveau.
Isis décida de sauver son fils. Elle partit à la recherche d’Horus, accompagnée de son fidèle Anubis. Elle finit par le retrouver gisant aveugle sur une montagne. Elle lui frotta les orbites avec du lait de gazelle jusqu’à ce qu’il retrouvât la vue et les lécha avec sa langue de vache.
Lorsqu’il ouvrit les yeux, sa vision de la réalité avait changé.
Il vit ce qu’il n’avait jamais vu, il vit la réalité au-delà des apparences.
Comme son père Osiris, Horus doit mourir et renaître à un autre niveau de conscience.
Et, de même qu’Isis a sauvé Osiris, elle va sauver Horus une fois encore. Elle humecte ses yeux avec du lait de gazelle, le lait maternel, et les lèche de sa langue de vache.
Avec sa tête de vache, c’est une nouvelle Isis qui se manifeste. Elle est toujours maternelle, mais la mère sur-protectrice et excessive a disparu. Elle pardonne à son fils qui ouvre sur elle des yeux neufs, avec un nouveau regard.
Ainsi, le lien entre la mère et le fils est reconstitué à un niveau supérieur. Le fils peut reprendre son combat sans qu’Isis intervienne. Et il va vaincre le mal définitivement, avec l’aide de son père Osiris.
Le triomphe d'Isis
Malgré cela, le combat entre Horus et Seth reprit et dura une période interminable: un siècle d’affrontements violents! De guerre lasse, les dieux décidèrent enfin d’y mettre fin, et c’est Osiris qui prit la décision ultime, s’érigeant en juge. Il décréta que c’était Horus qui monterait sur le trône. Seth fut ainsi définitivement vaincu et prêta allégeance à Osiris. Il fera dorénavant souffler une brise favorable dans les voiles de la barque d’Osiris menait les morts vers leur ultime demeure.
Le jugement d’Osiris mit fin à cette guerre fratricide et consacra la victoire d’Isis, la déesse qui savait plus que nulle autre aimer, soigner, guérir, sauver, et se battre pour la vie.
Le combat ne se résolvant pas, un jugement final est rendu par Osiris. C’est lui qui décide de la destinée de son fils. Horus va prendre sa succession et vaincre les forces du mal.
Osiris, lui, est devenu souverain grâce à Isis qui l’a initié et guidé.
La perte du Phallus d’Osiris correspond à la nécessité pour l’homme de sacrifier ses exigences infantiles vis-à-vis de la femme, c’est-à-dire cesser d’attendre d’elle la satisfaction de tous ses désirs sexuels, émotionnels, affectifs. Il doit renoncer à la mère et à la putain, celle qui le sécurise et celle qui satisfait ses désirs sexuels. Il doit ainsi sacrifier son infantilisme, sa puérilité. Ce sacrifice seul peut le mener à une naissance spirituelle.
En tant que déesse, Isis a assimilé de nombreuses autres déesses et leurs attributs: la déesse-vache Hathor, la déesse-chatte Bastet, la déesse-lionne Sekhmet, la déesse guerrière et archère Neith de Saïs. Elle domine tout le panthéon des déesses.
Avec l’arrivée des Grecs, elle fusionne avec des déesses grecques, comme Déméter, Aphrodite, Athéna, Artémis.
Mais pour les Grecs et leur civilisation patriarcale, elle devient lunaire et perd son aspect solaire masculin, ce qui l’appauvrit.
Chez les Romains, elle devient Cérès tout en restant Isis. Durant les premiers siècles du christianisme, les Romains continuent à aller dans les temples d’Isis, tout en assistant aux cultes chrétiens. Ce n’est qu’en 550 après J.C. qu’on a fermé le dernier temple d’Isis sur l’île de Philae en Égypte.
Mais la grande-déesse n’a pas disparu pour autant. Elle est revenue par la "petite porte" sous l’aspect des vierges noires. Dans certains hymnes, la vierge Marie elle-même est appelée "Notre Dame la Noire", "La nègre", "La brune", "L’égyptienne", "Notre Dame de sous terre"…
Quant à la littérature, elle a fait la part belle à Isis jusqu’au 20ème siècle.
Isis, la femme complète
"Parce que je suis la première et la dernière
Je suis la vénérée et la méprisée
Je suis la prostituée et la sainte
Je suis l’épouse et la vierge
Je suis la mère et la fille
Je suis les bras de ma mère
Je suis la stérile et mes enfants sont innombrables
Je suis la bien mariée et la célibataire
Je suis celle qui donne le jour et celle qui n’a jamais procréé
Je suis la consolation des douleurs de l’enfantement
Je suis l’épouse et l’époux
Et c’est mon homme qui m’a créée
Je suis la mère de mon père
Je suis la sœur de mon mari
Et il est mon fils rejeté
Respectez-moi toujours
Car je suis la scandaleuse et la magnifique"
(Hymne à Isis, IIIe ou IVe siècle après J.C. - découvert à Nag Hamadi)
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